Albrecht Dürer
Le Chevalier, la Mort et le Diable
1514
Qu’on ne cherche pas à diminuer notre foi dans la renaissance prochaine de l’Antiquité hellénique, car c’est en elle seulement que réside tout notre espoir d’un renouvellement et d’une purification de l’esprit allemand par la magie de la musique. Que pourrions-nous citer d’autre qui, dans cette désolation et cet épuisement de la civilisation d’aujourd’hui, puisse éveiller quelque consolante espérance d’avenir ? C’est en vain que nous cherchons une seule racine vigoureusement ramifiée, un morceau de terre fertile et saine : partout, ce n’est que poussière, sable, torpeur, dépérissement. Dans une situation semblable, un homme désespérément seul ne saurait se choisir de meilleur symbole que le Chevalier, la Mort et le Diable, tel que Dürer l’a gravé, le chevalier en armure au dur regard d’airain qui suit tout droit son chemin de terreur, indifférent à ses affreux compagnons, et pourtant sans espoir, seul avec son cheval et son chien. Notre Schopenhauer a été ce chevalier de Dürer : il ne nourrissait aucun espoir, mais il voulait la vérité. Il n’a pas son pareil.
Collection: Cleveland Museum of Art (Elisabeth Severance Prentiss and Leonard C. Hanna, Jr. Collections by exchange)
Dimensions: 190 x 244 mm
Text: Friedrich Nietzsche, La Naissance de la tragédie, 1872
Publié: Juin 2016
Catégorie: Illustration
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