Marguerite Yourcenar
Mémoires d’Hadrien
1951
Je serai jusqu’au bout reconnaissant à Scaurus de m’avoir mis jeune à l’étude du grec. J’étais enfant encore lorsque j’essayai pour la première fois de tracer du stylet ces caractères d’un alphabet inconnu : mon grand dépaysement commençait, et mes grands voyages, et le sentiment d’un choix aussi délibéré et aussi involontaire que l’amour. J’ai aimé cette langue pour sa flexibilité de corps bien en forme, sa richesse de vocabulaire où s’atteste à chaque mot le contact direct et varié des réalités, et parce que presque tout ce que les hommes ont dit de mieux a été dit en grec.