Jean-Victor Bertin
Paysagiste historique
1800–1814
Né à Paris en 1775, élève de Valenciennes, mort en 1842. Ce maître, omis par M. Charles Blanc, est un des plus grands peintres de son époque. Il tient le premier rang parmi les paysagistes et est même supérieur à Valenciennes et à Michallon. Nous ne craignons pas d’avancer que jamais dans l’école moderne un paysagiste n’a atteint le talent de Bertin. Il faut remonter au Poussin, à Claude Lorrain et aux maîtres de l’école hollandaise, tels que les Ruysdaël, les Hobbéma, les Van de Velde, pour rencontrer une exécution aussi finie et une touche aussi moelleuse. Et cependant ce maître indiscuté n’est pas exposé au Louvre, alors que Constable y compte plusieurs tableaux. Nous avons pourtant lu, dans le grand catalogue du Louvre, l’indication d’un tableau de Bertin : Vue de la ville de Phœnos et du temple de Minerve Cæphies. Cet unique et intéressant tableau du Louvre, signé et daté de l’an IX, et qui, au Salon de cette année-là, avait obtenu le prix d’encouragement, est dérobé aux regards du public (?). […] Comme les Bidault, il s’était attaché particulièrement aux sites italiens ; ses vues des Apennins et des lacs, ses aperçus de petites villes de l’Ombrie et de Toscane forment des sujets délicieux. Souvent il y place des scènes tirées de l’histoire romaine ou grecque, ou simplement des bergers avec leurs troupeaux. S’il n’a pas le côté romanesque de Demarne, il offre une poésie classique non dépourvue de charmes, interprétée surtout avec vérité. Sa peinture est pleine de franchise et de vivacité dans la touche, ses sites riches et variés, ses devants, quoique formant repoussoirs, ne sont pas noirs, et ce mérite est assez rare. Ses arbres sont parfaitement groupés et d’une heureuse forme. Les beautés des tableaux de Bertin sont de celles auxquelles on aime à revenir.
Bertin est un chef d’école : de bons paysagistes tels que Michallon, Budelot, Pau de Saint-Martin, Coignet, Boisselier, Vauthier, Corot (ce dernier n’a jamais fait qu’esquisser des ébauches) se sont formés à ses principes. En ornant ses tableaux de scènes à personnages historiques, de temples et de colonnades, de fleuves aux ondes limpides, et surtout grâce à son talent hors ligne, Bertin a mérité le titre de chef de l’école paysagiste historique.